Sous surveillance médicale #13
J’ai demandé à Google de me livrer toutes mes données personnelles stockées par leurs soins. Cela s’appelle le takeout. L’archivage a pris plusieurs heures. Le résultat tient en deux dossiers, le premier est léger, le second pèse 10 go. Dans le premier, j’ai accès à toutes les métadonnées des albums photos que j’ai partagés via Google dans ma vie, mais aussi toutes mes requêtes entrées dans le moteur de recherche, absolument toutes, depuis mai 2010, et je suis étonnée du nombre de recettes de cuisine. Mais Google stocke aussi toutes les recherches effectuées dans la messagerie Gmail, quand j’ai cherché un expéditeur ou un message en particulier par exemple, toutes les transactions, contacts (bon à savoir en cas de perte de matériel, Google a tout gardé, inutile de s’embêter à faire des sauvegardes), les formulaires remplis ici et là avec numéros de sécurité sociale, téléphone portable etc. Il y a aussi le relevé des téléphones Android utilisés, avec les configurations choisies, les dates de connexion, et bien sûr toutes les adresses postales entrées un jour ou l’autre sur Google Maps. Le second dossier recense tous mes messages envoyés et reçus sur Gmail, y compris les spams. Je savais à quoi m’attendre, mais je voulais faire l’expérience de me trouver face à cette réalité, ce défilé exhaustif de ma vie numérique qui pèse un peu plus de 10 go. Je n’imagine même pas ce que ça doit donner chez Apple : 1 to peut-être ? Je ressens un certain malaise à voir ces informations stockées de manière si visible sur mon finder. Comme un relevé de toutes les questions qui me sont passées par la tête un jour, au cours de ces 10 dernières années. Et que je m’empresse de supprimer fissa de mon disque dur. Juste avant de le faire, un dossier perdu dans l’arborescence infinie de ce takeaout attire mon attention : il s’intitule Takeout. Il récapitule ma demande de takeout, c’est-à-dire que dans mon dossier takeout, je peux avoir aussi un aperçu de ma propre requête takeout avec la date et mon adresse IP, me rappelant que cette requête a aussi laissé une trace, au cas où je serais une adepte des mises en abyme.