On parlait,
on riait,
et tu n’avais même pas remarqué
que mon visage avait changé.
Livre numérique
Éric Pessan
Biji éphémérides
Janvier 2020
L’ouvrage
Un livre, 366 fragments (pour prévoir les années bissextiles), quatre parties : des textes sur la littérature et de courts récits-poèmes, 50 choses à faire avant de mourir, un récit d’enfance fragmenté, une harangue à un jeune poète. Tout ceci se mélange, apparaît jour après jour de manière aléatoire ou selon un ordre choisi…
"Il écrit tout cela […] dans un de ses carnets biji. Le biji [筆記] est un genre de la littérature classique chinoise apparu pour la première fois sous les dynasties Wei et Jin et qui a atteint sa pleine maturité sous les dynasties Tang et Song. Biji peut être traduit rapidement, mais de manière assez fidèle, par “carnet de notes”. Les différents éléments d’un biji peuvent être numérotés, mais il est également possible de les lire dissociés, sans suivre un ordre déterminé, en s’ouvrant un chemin à partir de n’importe quel point, sautant d’arrière en avant, de haut en bas ou d‘un côté à l’autre. Commencer par la fin et terminer par le début. L’idée, c‘est que d’une façon ou d’une autre, chaque lecteur découvre une histoire aussi unique que le sera sa lecture. Un biji peut contenir des anecdotes étranges, les mots d’un autre, des pensées éparses, des spéculations de type philosophique, des théories personnelles sur des sujets très intimes, des notes sur d’autres œuvres et tout ce que son propriétaire et auteur jugera bon d’y faire figurer." Rodrigo Fresan, in La Part Rêvée, traduction Isabelle Gugnon, Seuil, 2019
Extrait
[…]
La littérature ne se soucie pas des humeurs qu’elle génère. On ne lit pas pour être heureux, pour se divertir, pour penser à autre chose, ou pour attraper une dose de tristesse. Les sentiments véhiculés par la littérature ne sont qu’un effet secondaire, avant tout on lit pour lire.
[…]
Enfant, à part jouer à la belote de temps en temps avec mon grand-père, aider ma grand-mère à préparer les repas ou tenter de finir des grilles de mots-croisés abandonnées, je n’avais rien d’autre à faire que de m’ennuyer, regarder autour de moi, marcher au hasard des chemins, jurer de ne pas me perdre en forêt, jurer de m’éloigner des vipères, jurer de ne pas répondre aux questions d’éventuels inconnus, jurer de ne pas monter dans une voiture. Les deux mois d’été avec mes grands-parents se déroulaient comme un dimanche avec mes parents : dans l’attente d’un événement qui n’arrivera pas.
[…]
C’est une lettre de Kafka à Oskar Pollak postée en 1904 : Il est bon que la conscience porte de larges plaies, elle n’en est que plus sensible aux morsures. Il me semble d’ailleurs qu’on ne devrait lire que des livres qui vous mordent et vous piquent. Si le livre que nous lisons ne nous réveille pas d’un coup de poing sur le crâne, à quoi bon le lire ? Pour qu’il nous rende heureux, comme tu l’écris ? Mon Dieu, nous serions tout aussi heureux si nous n’avions pas de livres, et des livres qui nous rendent heureux, nous pourrions à la rigueur en écrire nous-mêmes.
Je lis plusieurs fois cette lettre parce qu’elle est à moi, c’est-à-dire que j’ai déjà pensé et écrit chaque mot qu’elle contient avant de la connaître. Je suis heureux de la découvrir tardivement, à un âge où elle ne m’a pas empêché de formuler moi-même son contenu.
Je me demande si, plus jeune, je me suis retenu de considérer avec sérieux certaines idées parce que j’avais l’impression qu’elles n’étaient pas les miennes, parce que je les avais trouvées dans des livres et non dans mon expérience et ma pensée.
L’auteur en bref
Informations
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Prix4,99 €
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Nombre de pages(non concerné)
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Parution10/02/2020
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Le numérique : un nouvel art d’écrire ?
Notre collection numérique, qui accueille des formes et des genres multiples (journal de bord, fiction, poésie, théâtre, essai littéraire…) publie des projets d’écriture réalisés par des auteur·rice·s ayant séjourné à La Marelle, tout comme d’autres qu’elle sollicite ou qu’elle souhaite accompagner. Y sont proposées des créations originales qui témoignent, le plus souvent, du principe même des résidences portées par La Marelle : favoriser la rencontre entre l’écrit et d’autres champs artistiques, grâce au mouvement ou à l’intégration de sons, d’images ou de vidéos, mais aussi proposer des narrations non-linéaires, des lectures aléatoires, des écritures collectives, etc.
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