En résidence de création
Je suis mal assise
Julie Gourmaud
Le projet d’écriture
En résidence à La Marelle, Julie Gourmaud poursuit l’écriture de Je suis mal assise, un projet de bande dessinée autobiographique.
Note d’intention de l’autrice
Je suis mal assise est né de mon expérience des violences subies dans le cadre d’une relation de couple à l’adolescence, du besoin de témoigner, mais surtout d’un désir de porter un regard sur l’Après : le rétablissement, encore peu représenté dans les récits de violences intimes.
Plutôt que de revenir sur les faits violents eux-mêmes, je m’attarde sur le processus de réparation, sur ce qui a suivi cette relation. Pourquoi ai-je mis si longtemps à comprendre ? Pourquoi ai-je laissé quelqu’un avoir ce pouvoir sur moi ? Qu’est-ce que cela dit de ma place, de mon rôle dans la société ? Comment mon histoire individuelle reflète-t-elle les logiques sociales et systémiques plus larges ?
En explorant ces questions, je tisse un récit personnel et politique. Je puise dans mon parcours affectif, familial et social pour interroger mon rapport à l’attachement, à l’enracinement, ainsi qu’à la parole ou à la honte. Ces réflexions prennent forme à travers le dessin, qui me permet d’exprimer ce que je n’ai pas été capable de dire à l’époque. Ce projet est un autoportrait, une mise en dialogue de l’injonction au silence et du besoin de revendiquer.
Là où les récits de violence sexiste et misogyne, sont encore minorés et mis en doute, l’auto-représentation comme sujet de cette violence est un acte politique. Mettre en scène mon corps, mon intimité, me raconter est un acte impudique et subversif. C’est un geste de réappropriation de la parole et une tentative de rendre visibles les structures injonctives.
Le récit s’articule autour de séquences narratives autobiographiques et d’autoportraits. Les variations du rythme narratif me permettent d’alterner entre introspection et recul critique. Habitée par plusieurs années de recherches graphiques et narratives, je construit le récit au fur et à mesure et de manière instinctive, en dessin direct : case par case, page par page, sans scénario ou découpage définit au préalable. Le dessin EST le récit et non un moyen de l’accompagner. Les mots y sont rares et n’existent que comme l’écho d’une parole tue.
Le dessin est minimaliste et l’utilisation du symbole est un moyen détourné d’exprimer un intérieur en lutte. Tiraillée par des désirs contradictoires qui m’immobilisent et accentuent l’impression d’isolement, je trouve avec le symbole un canal de communication vers l’extérieur. Condenser un sens, une idée, une émotion est un moyen direct d’adresser un message aux aux lecteurices, qu’iels baignent ou non dans la même réalité complexe et désorganisée que la mienne.Le symbole structure ma pensée, traduit mes émotions et donne du sens au réel, tout en laissant une part libre d’interprétation. La synthèse laisse des creux dans lesquels chacun·e peut projeter son propre vécu.
Julie Gourmaud
Planches

© Julie Gourmaud, 2025
Le lieu de résidence
La résidence de Julie Gourmaud a lieu à la Villa des auteur·rices, dans le logement de résidence à la Friche la Belle de Mai à Marseille.
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