En résidence de création
Marguerite et Lila, la tragédie
Eléonore de Duve
Le projet d’écriture
En résidence à La Marelle, Eléonore de Duve poursuit l’écriture de deux textes : Marguerite et Lila, la tragédie.
Note d’intention de l’autrice
« Marguerite & Lila, la tragédie ne sont pas seulement deux textes ; ce sont des formes de vie - des formes émergeant d’un monde chaotique et qui tendent vers l’espoir.
Dans l’art, et dans ses pièces de théâtre, que Lila joue et orchestre, celle-ci trouve des moyens de faire face, tandis que Marguerite, avocate, modifie ses dossiers, en y insérant des visages.
Elles sont très différentes. Elles ne se laissent pas contenir dans des pages.
Marguerite me paraît dure et solitaire ; en miroir, elle rend l’écriture dure et solitaire. Dans Lila, malgré la tragédie, quelque chose résiste, et me permet de trouver la lumière.
Ainsi Marguerite et Lila se nourrissent-elles. L’élan de la seconde m’aide à composer Marguerite : disons, sans que toutes les tristesses ne l’emportent.
À Marseille, je continuerai de les écrire, en me cognant si possible aux vents, singulièrement présents dans Lila, et en tournant le visage vers l’au-delà des mers et de leurs tragédies. »
Eléonore de Duve
Extraits des projets en cours
« La grand-mère a vécu avec son temps. Il y a eu, dès le commencement, le krach, dans le vent les petits papiers, l’élaboration du carcan, la radio, les nonnes, les incendies, l’Holocauste et les fascismes, il y a eu les camps, la paix, le partage et les vols et le boom, la traite, le travail, les enfants, le déclassement, la décolonisation, les possessions, de nouveaux enfants, et la cigarette, le rideau de fer, des guerres différentes, il y aura de toute façon eu les luttes, l’ultra, les nuées, les morts et le sida. Jusque-là, la grand-mère n’avait cessé de persévérer, de libérer les espoirs – à présent elle est fatiguée, ma petite douce. »
Extrait de Lila, projet en cours 2025, Eléonore de Duve
« Elle longeait les tombes basses et composites, certaines nues de toute enveloppe, pourvues juste d’une stèle, d’une évocation. Elle tournicotait donc dans ces chrysanthèmes-là, l’air au-delà ne cessait de se refroidir. Il était nécessaire de rajuster le châle encore. Un grand flou se dessinait ; elle s’était assise, ses lèvres parcourues d’un frisson. L’irisation du sol camouflait le chiendent, les trèfles géniaux et la petite oseille. Mais au-dessous, la terre était bouffie et, au-dessous : dans une concession abandonnée, on trouvait des ossements, commençant de se séparer ; ils ne dataient pas tant. Mais vu la loi, l’état, et les années, un contenu plastifié, cloué sur un bâton et planté dans le sol s’adressait aux proches à l’évidence : il fallait faire quelque chose. Les morts de Marguerite eux obéissaient à d’autres règles et ils étaient ailleurs. Elle ici ne visitait personne et elle ne se trouvait pas là par hasard, si ainsi elle s’y fixait, elle cherchait sa réaction : bouge, c’était comme si. Une petite pensée l’avait traversée, celle qui s’échappe et qu’il faut sans cesse retrouver, celle de la force d’un peuple de vivants, l’incroyable petite phrase de leurs existences.
Plus tôt, la douleur avait irradié : Marguerite avait eu la sensation de manipuler une substance hautement toxique : du papier, des lois. »
Extrait de Marguerite, projet en cours 2025, Eléonore de Duve
Le lieu de résidence
La résidence d’Eléonore de Duve a lieu à la Villa des auteur·rices, dans le logement de résidence à la Friche la Belle de Mai.
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