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En résidence de création

Maisons d’enfance
auror·404

■ Juillet 2024
■ La Ciotat

Le projet d’écriture

2013. Sur les murs de Paris, la France a besoin d’enfants, pas d’homosexuels. Alors que Samaël doit retourner dans le bassin minier du Pas-de-Calais pour vider la maison qui l’a vu grandir, les slogans de la Manif pour Tous lui rappellent tout ce qu’il a dû fuir.

Note d’intention de l’auteur·rice

Écrire sur ce que la Manif pour Tous a fait à nos vies. 
Écrire contre le déterminisme de la reproduction sociale.
Réfléchir à la possibilité d’une brèche qui proposerait autre chose que la figure du transfuge de classe.
Développer ce que les origines des personnages ont ancré dans leurs corps, dans leurs manières d’entrer en relation, de se toucher, de s’écouter.
Déhiérarchiser les liens intimes en donnant un rôle central aux amitiés. 

Brassant les notions d’héritage - matériel, historique, symbolique – de trauma et de violence sociale, Maisons d’enfance questionne la difficulté de faire famille autrement, en particulier dans les communautés queer.

auror·404



Extrait

Comment je peux te dire les moisissures sur le mur de ma chambre, l’absence d’électricité dans les pièces de l’étage, le froid humide qui m’a amené jusqu’à la pneumonie et m’a alité tout un trimestre en cinquième ? Non, vraiment, quelque chose me tabasse dans ce retour à l’endroit de mon enfance.
Tu n’insistes pas, tu comprends que ce n’est pas à propos de toi. 
Tu mets une main sur mon épaule.
C’est un geste solide, je sens l’empreinte de tes doigts à travers les couches de vêtements.
Tu demandes : là, qu’est-ce que tu veux, toi ? 
Je ne sais pas. Je ne ressens plus mon désir ni l’alphabet de mon système nerveux. Je suis corseté dans des chairs armures, dans un corps blockhaus, dans des guet-apens. Parfois, je crois percevoir dans ta voix changeante les mêmes guerres civiles et souterraines. Je m’y accroche.
J’implorerais bien un exorcisme pour faire fuir l’automate qui me hante. Je dis « j’implorerais » mais je n’y arrive pas : lâcher prise me demande plus de courage que de partir au front.
Je voudrais dire regarde comme mes muscles m’éprouvent, comme ma nuque, mes épaules, ma mâchoire, ma colère. Nos cages thoraciques sont noircies des fantômes de nos enfances.
Il faudrait un rituel de purification.
Je dis Je veux un hors-lieu.
Alors tu suggères d’aller à la mer.
Et, parce que tu me laisses conduire, je choisis de me perdre.
Je me dis aussi, en secret : c’est dommage qu’on n’ait pas pu switcher, moi mon père n’en finit pas de refuser de mourir

Extrait de Maisons d’enfance, auror·404, 2024

Le lieu de résidence

Depuis le printemps 2021, La Marelle a ouvert cette nouvelle “maison”, la Villa Deroze, située au milieu des pins, sur les hauteurs de la cité portuaire de La Ciotat. Confiée avec générosité par Danielle Deroze, elle est destinée à accueillir artistes, auteurs et autrices, pour des projets de création qui souvent se croisent ou s’hybrident.

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