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Dimanche 16 février

Carnet de résidence

Benoît Virot

26 Avril 2020

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Travaux de résidences

Pouvoir, prostate, amour, folie : que demander de plus au voyage ? Enseigne promotionnelle à un carrefour de Kinshasa © Benoît Virot

Traversée de longue ampleur de la ville, qui longe le palais de pierre où fut assassiné Kabila (par son garde du corps). Joie des enseignes de la cité, ici les magasins, les écoles, les églises ont des noms plus frappants, vivants, emblématiques les uns que les autres. Même les portes des bus affichent des slogans intenses comme des leçons de vie.

Détour par le paradis des bonobos. Le Congo est le seul pays au monde où s’ébat ce grand singe vouant sa vie aux câlins dès le premier âge. Gauz s’étonne qu’avec de si grosses couilles, ce soient les femelles qui aient le pouvoir. Étienne nous dit que ce ne sont justement pas les couilles des mâles mais le clitoris des femmes. Je demande à voir.

Le soir, virée avec l’ambassadeur au temple de la rumba. La rumba des années cinquante, que les jeunes désertent, un peu comme le tango à Buenos Aires, vite reléguées musiques de grand-père. La soirée commence par une reprise de L’Été indien, puis se fait de plus en plus vive. Le père fondateur passe son temps à surveiller les entrées, à saluer les arrivants, entre son iPhone et une bouteille de coca. Sur scène, le quarteron de vieux, ils sont au moins sept ou huit qui se succèdent avec une nonchalance rassurante et impressionnante. Le pas de danse est très lent, quasi statique, le corps bouge imperceptiblement, mais avec une concentration fatigante – comme le piétinement contraint dans les musées aux heures de pire affluence. Étienne fait passer un très beau catalogue de photos et sculptures édité à Leipzig, dont un Garden pop et osé. Regrets amers : le paratexte est décevant, qui n’éprouve pas le besoin de refaire l’histoire des apports de l’art congolais au XXe siècle – très présomptueux, même.

Au dîner, face à face entre deux des invités autour de la drague et du viol, M. recommande avec verve et hauts cris comme autodéfense de mordre et d’avaler, ça me rappelle un certain concours de saillies scatophiles à mon dernier jour à Bassam. Le lendemain, S. me confiera n’être pas intéressée pas un texte s’il n’y a « ni sang ni sperme ». Penser à lui envoyer Querelle. Discussion nocturne avec M., sa formation à l’autodéfense dans les rues, de sa posture hyper revendicative, de son italianité, de sa vision libérale du métier. Je taquinerai ladite vision tant que je pourrai.

 

[caption id="attachment_15748" align="alignleft" width="273"] Auteurs en exploration © Benoît Virot[/caption] [caption id="attachment_15747" align="alignleft" width="273"] Bébé bonobo © Benoît Virot[/caption] [caption id="attachment_15746" align="alignleft" width="273"] Le Parc des bonobos © Benoît Virot[/caption] [caption id="attachment_15745" align="alignleft" width="273"] Le Parc des bonobos et sa fondatrice © Benoît Virot[/caption]
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